Le Programme de Construction Sans Bois

1. Introduction

Historique de la construction sans bois au Niger

La construction à voûte et coupole fondée sur une technique égyptienne très ancienne a été introduite au Niger par le projet Tapis Vert de l´architecte Hassan Fathy : “Cette technique permet de construire des toitures en briques de terre séchée au soleil sans qu’on ait besoin d’utiliser de soutènements de ciment ou de bois.” (Projet Tapis Vert : Programme de construction).

En 1985 la technique fit son chemin dans le cadre du projet Aïr Ténéré pour la conservation et la gestion des ressources naturelles. Le programme « Construction Sans Bois » ou « Unité de Formation et de Sensibilisation » a pris le relais depuis 1993.

Programme Construction Sans Bois

Le programme « Construction Sans Bois » est exécuté par IUCN et DW sur financement Danois en collaboration avec les ONG CDR, ABC Ecologie et BERIA

Il a pour objectifs de :

  • contribuer à une meilleure conservation, gestion et valorisation des ressources naturelles du pays;
  • faciliter la construction d’un habitat décent et durable à la portée de la grande majorité;
  • permettre aux populations les plus démunies d’être responsabilisées en participant à l’amélioration de leur propre environnement bâtit sans dépendre de ressources externes ou peu disponibles.”

Dans l’ensemble, environ 100 maçons formés en technique de construction voûte et coupole ont construit 1500 bâtiments sur le du territoire national. 71 d´entre eux ont bénéficié du PCSB et sont repartis sur des zones prédéfinies :

  • 32 à Zinder (16 BIT et 16 SOS)
  • 3 à Tahoua (PROFORMAR)
  • 4 à Maradi (CARE INTERNATIONAL)
  • 32 à Filingué

2. Dynamique de l’habitat

L’habitat doit être ici considéré comme la manifestation sociale et culturelle de l’occupation de l’espace par une communauté donnée. Le concept d’habitat renferme des informations aussi diverses sur le plan de l’organisation sociale de la communauté, de l’appartenance sociale de ses membres, du type d’activité prédominant, de l’organisation familiale, des relations entre la famille et la communauté, du niveau d’ouverture de cette communauté vers l’extérieur et surtout de l’état de l’environnement immédiat d’où sont extraits les matériaux de construction.

Problèmes globaux et spécifiques de l’habitat au Niger

Le principal problème de l’habitat au Niger est incontestablement le manque de politique nationale en matière d’habitat. Une politique nationale d’habitat permettrait d’orienter les recherches en matière de construction, d’adapter les habitations au contexte socio-économique et culturel du pays, en tenant compte du climat. Toutefois, il existe au Niger un habitat dit traditionnel adapté à la situation pluviométrique et même économique du pays. Cet habitat mérite d’être conservé et préservé parce qu’il est encore nécessaire compte tenu de son coût faible et de l’utilisation exclusive faite des matériaux locaux.

En dehors du manque d´une politique liée d’habitat, l’autre difficulté est l’inexistence ou le non respect des schémas directeurs d’urbanisme dans certaines régions. En effet, la composition des Commissions d’Urbanisme et d’Habitat fait elle-même entorse à certaines réalités. Nous avons constaté que des services tels que le Génie Rural (espaces vert, parcs d´agrément…) et l’Environnement ne sont pas représentés dans les Commissions régionales et sous-régionales d’Urbanisme et d’Habitat.

Il est dommageable que les schémas d’urbanisme déjà réalisés ne soient pas toujours respectés. C’est le cas notamment dans les communes et les arrondissements où des espaces réservés à des réalisations d’intérêt public telles que les parcs d’agréments et les espaces verts sont progressivement morcelés pour satisfaire la demande en parcelles loties.

Le manque de main d´œuvre qualifiée et la rareté de certains matériaux et matériels de construction font partie des problèmes que rencontre l’habitat aussi bien traditionnel que moderne. A cela il faut ajouter l’influence du modernisme et le souci de prestige, le manque de temps, et enfin la diminution voire la disparition de l’entraide familiale qui sont autant de facteurs qui limitent la construction.

Les différents types d’habitat

Il existe plusieurs techniques de constructions en banco et les types sont aussi variés. Il suffit pour cela de voir les architectures traditionnelles. Nous savons que cette architecture traditionnelle s’est établie depuis des générations comme l’attestent le palais du Sultan de Zinder, les habitations comme celles de Tahoua ou des maisons anciennes à Maradi, Filingué et dans presque tout le Niger.

On rencontre encore de nos jours des maisons à toiture terrasse, avec voûtes, coupoles ; des cases circulaires et rectangulaires ; et des maisons peintes avec coupoles nervurées.

  • La case ronde ou paillote traditionnelle

La paillote est aujourd’hui perçue dans le cadre d’un ancien village comme l’habitat des plus démunis. Sa toiture est partiellement reprise tous les cinq ans en moyenne et le soubassement peut tenir pendant une vingtaine d’année. L’andropogon qui est le matériau utilisé dans ce cas est toujours disponible compte tenu de sa régénération facile et du fait de son utilisation fréquente comme haie vive pour la séparation des champs.

La paillote a l’avantage de laisser passer l’air, ce qui est très apprécié par les occupants. L’étanchéité du toit, première exigence des populations, est aussi assurée par l´utilisation du chaume. La construction d’une paillote ne nécessite pas la présence d’un maçon ; elle peut être construite par trois ou quatre jeunes du village en une seule journée de travail.

  • La maison en banco

a) Kudandan

Elle se présente comme une case ronde ou carrée modelée en banco avec une toiture bombée, toujours en banco, sur laquelle repose souvent une toiture en paille pour obtenir une température moins élevée.

b) Chigihua

Cette forme de maison en banco avec toiture terrasse tire son origine des régions hausa et s’est vite répandue. On en rencontre plusieurs sortes suivant les régions, mais la conception est toujours la même. La seule différence réside dans les motifs et les ouvertures des portes et des fenêtres. La Chigihua est généralement faite en briques de banco avec un enduit en banco. Les poutres sont soit en bois local soit en doumiers, voire en rôniers selon les disponibilités. La toiture en terrasse est aussi en banco et repose sur des nattes en secco ou en feuilles de doumiers ou de rôniers.

  • La maison en semi dur

Il s’agit essentiellement des constructions en banco qui reçoivent un enduit au ferro-ciment communément appelées semi-dur. Leurs toits peuvent être en terre, en tôles avec des poutres en rôniers. Les clients du semi dur sont issus de la classe moyenne et on rencontre ce type d´habitat surtout dans les zones semi urbaines et urbaines. C’est une habitation intermédiaire entre le traditionnel et le moderne.

  • La maison en dur

Ce sont des maisons en agglomérés de ciment, en pierres, en terre stabilisée ou compressée, dont les toits sont recouverts de tôles soutenues par des poutres autres que le bois (IPN, tubes ou fers carrés). Toutes ces constructions présentent la même forme, il n’y a que la nature des matériaux et le matériel de toiture (tôles, bois…) qui les différencie en terme de coûts, de durabilité, et de confort.

  • La construction sans bois

Dans cette catégorie de construction on classe les ouvrages qui utilisent des arcs, des voûtes et des coupoles comme système fondamental. Alors que l´usage de ces systèmes est très répandu dans les pays du Moyen-Orient et en Egypte depuis le troisième millénaire avant J.C., au Niger il a été introduite récemment par le projet « Tapis Vert » et reprise par le PCSB.

Les différents modèles vont du plus simple au plus compliqué, de la simple case ronde ou carrée en coupole à une combinaison de coupoles, de voûtes, et d’arcs. Les matériaux utilisés pour les maçonneries sans bois sont nombreux et variés. Ils vont du simple banco pétri avec de la paille ou du résidu de l’épi de mil au banco amélioré, à la terre stabilisée, ou encore à la pierre, au ciment etc. Pour assurer l’étanchéité du toit, l’eau est guidée par les gargouilles et ces toits peuvent être recouverts, soit par un enduit de terre, mais qui demande un entretien fréquent, soit par un enduit de chaux-sable ou plâtre-chaux-sable qui demande aussi un entretien minimum. Il existe également d’autres formes de protection : les couvertures de chaumes, de pierres plates, et de tuiles, ou encore, pour les gros budgets, les membranes à base de bitume, de peintures étanches, ou de feuilles métalliques (alliage de zinc ou d’aluminium).

3. L’impact de la construction de l’habitat sur l’environnement

Le bois de service, utilisé dans la construction de l’habitat n’a jamais fait l’objet de préoccupation de la part des services chargés de sa gestion. Cela explique l’absence totale de données et la non taxation de cette catégorie de bois.

On estime pourtant pour le Sahel à 90% la quantité du bois coupé pour la cuisson des aliments et à 9 % pour la construction de l’habitat. Des enquêtes ont révélé que la demande en bois se situe au minimum à 0,1 m3 par an et par habitant et que le bois de service y représente une grande proportion.

Le bois de chauffe constitue de très loin le principal produit forestier du Niger ; les filières liées au bois de service n’ont qu’une importance marginale. Cependant, quoique la quantité du bois utilisé dans la construction de l’habitat ne représente qu´une fraction de ce qui est coupé pour le bois de feu, il n’en demeure pas moins que par sa nature, il a un impact sur l’environnement très significatif. En effet, il s’agit de bois de qualité, long et mûr, et donc de grands arbres.

La dégradation de l’environnement se traduit entre autres inexorablement par :

  • la désertification et ses conséquences;
  • la destruction de l’habitat de la faune;
  • la baisse de la diversité biologique.

Mais il n’y a pas que la construction de l’habitat traditionnel qui a des effets néfastes sur l’environnement. Certes, son impact est beaucoup plus perceptible sur le terrain car la coupe abusive des forêts mène graduellement à la désertification et ses conséquences affectent directement la population ; mais d’une manière générale, même les constructions en matériaux définitifs contribuent à la dégradation de l’environnement dans les lieux de production de ses matériaux et pendant leur transport. En effet, la production et le transport de ces matériaux consomment beaucoup d’énergie et libèrent divers polluants dans le milieu naturel.

4. Contexte actuel du Programme Construction Sans Bois

Le contexte actuel de la mise en oeuvre du programme sera abordé de façon à permettre une analyse globale et objective. Aussi, les termes de référence tels qu’ils sont proposés par le commanditaire amènent a envisager une évaluation du programme.

La présentation des résultats sera structurée en fonction des cinq critères d’évaluation retenus par la Charte de l’Evaluation de la Fondation de France.

1. Efficacité

  • Les ressources humaines formées disponibles

Les cabinets d’architectes informés de la technique
Plusieurs cabinets d’architectes ont reçu la formation

Les entreprises
Deux techniciens d’entreprise ont été formés et réalisent actuellement dans le cadre de différents marchés le suivi technique des activités.

Les maçons formés
Ont été formé : 6 formateurs principaux, 25 assistants formateurs, 52 maçons de grade 3, 63 de grade 2 et 84 de grade 1. Plusieurs de ces maçons n’ont jamais construit. La CSB constitue à l’heure actuelle un métier pour seulement 10% des maçons formés compte tenu de la crise économique et du marché réel de la CSB qui est encore en phase de développement.

  • Maîtrise technique

L’équipe DW maîtrise parfaitement la CSB et tente de transférer cette technique aux différents partenaires de la construction, mais l’adhésion de nouveaux clients à la CSB oblige les différents intervenants (bureaux d’études et entreprises) à considérer de plus en plus la CSB comme une technique de construction devant s’adapter à tous les matériaux et pas seulement au banco comme l’exige le PCSB.

De nombreuses expériences sont en cours pour mesurer l’adaptation de la terre stabilisée à la CSB afin d’agrandir le marché de la CSB et mieux de répondre aux exigences du milieu urbain qui pour les constructeurs est certainement plus rentable. La technique fait son chemin en fonction de l’offre et du potentiel existant.

  • Amélioration de la technique de construction

La technique de construction de la CSB connaît une évolution positive, en ce sens qu’elle se rapproche davantage des attentes des consommateurs. Les maisons de première génération avaient un problème quant à l’infiltration des eaux de pluies, ce qui les rendaient dangereuses et inhabitées par crainte d’un affaissement. Ce problème est en passe d´être corrigé.

2. Efficience

  • Réalisations en CSB et appréciations techniques

Environ une centaine de constructions a été réalisée dans le cadre du PCSB. Ce sont des constructions qui demandent une bonne maîtrise de la technique des arcs, voûtes et coupoles, car la combinaison de plusieurs éléments fait appel à une technicité différente de celle des autres types de constructions.

  • La formation des maçons

Les maçons formateurs maîtrisent bien la technique et sont capables de former et de diriger un chantier. Ceci est sans conteste un point fort des actions faites par le PCSB dans le cadre du transfert de la technique elle même.

  • La formation des techniciens et architectes

Certains aspects de la technicité en CSB sont encore maintenus par le programme « Construction Sans Bois » qui actuellement intervient dans la conception des grands chantiers. Cette intervention du programme peut être perçue comme une formation donnée aux cabinets d’architectes et vient ainsi combler la pratique en matière de conception qui avait manqué lors de la formation des architectes et techniciens.

  • L’association des maçons non opérationnelle

Il existe à Zinder comme à Filingué une structure regroupant les maçons formés en construction sans bois par le programme ; ces structures n’ont qu’une existence formelle, la nécessité de leur création étant ressentie beaucoup plus par le PCSB que par les maçons eux-mêmes. Ces associations ont actuellement une attitude attentiste face au PCSB qui les a créées.

3. Impact

Nous allons procéder à l’analyse des données concernant les clients de la CSB. Compte tenu de l’existence de cette technique à Filingué depuis 10 années, et même si le PCSB n’a intervenu que plus tard en 1993, il est plus pertinent d’analyser le comportement des clients spontanés dans cette zone.

L´analyse des zones de Zinder et Mirriah, concernés, elles, depuis 1993, nous permettront d’infirmer ou de confirmer les thèses dégagées. Cette approche comparative nous donnera des éléments d’appréciations quant à l’évolution globale de la CSB.

  • Avantages reconnus à la CSB

Les constructions en coupoles et voûtes se réalisent avec des matériaux qui peuvent être les mêmes que ceux des constructions avec bois. Ces matériaux (banco) sont produits localement et sont donc faciles à trouver et plus économiques que les produits importés.

Les CSB peuvent favoriser la création d’emploi car elle utilisent de la main d’œuvre pour la construction elle-même mais aussi pour la fabrication et le transport des briques.

L’effet de masse de maçonneries sans bois procure une bonne inertie thermique qui améliore le confort en temps de chaleur et de froid. Une CSB peut être faite avec beaucoup de simplicité afin de la rendre compétitive puisque les matériaux de base sont sur place.

Les CSB offrent aussi l’avantage d’un grand potentiel esthétique. En effet, les nombreuses possibilités de formes, de dimensions, de combinaisons d’éléments et les types de finitions variées permettent d’obtenir des espaces de qualité. La décoration traditionnelle est en parfaite harmonie avec la forme de la CSB.

Les CSB peuvent également être utilisées non seulement pour des logements économiques en milieu urbain, mais aussi pour des réalisations de grand standing et de luxe, comme l’attestent les complexes dispensaire-maternité de Bonkoukou (Filingué) de Garagoumsa et Gafati (Zinder), les dispensaires de Kourni et Koutchika (Matameye) et enfin le siège de Ridd-Fitila à Niamey.

  • Inconvénients de la CSB

Parmi les facteurs limitant l’engouement pour les CSB, il y a lieu de noter le rejet d´origine culturelle observé chez certaine populations et la peur de vivre sous un toit sans support apparent.

La toiture en banco pose un problème de propreté des murs qui portent les gargouilles d´écoulement. Si la construction sans bois entend s’orienter vers une clientèle d’un niveau plus élevé que celle visée par le PCSB dans sa formulation, alors elle devra résoudre le problème de la protection extérieure de la toiture.

Le coût trop élevé de la main d’œuvre en général et de la main d’œuvre qualifiée en particulier, le coût également élevé des matériaux de construction et leur adaptation ainsi que la non maîtrise de la technologie par un plus grand nombre de constructeurs sont autant de facteurs qui limitent l’utilisation de la technique CSB.

  • Impacts de la formation CSB sur la construction avec bois (CAB)

Les maçons formés en CSB reconnaissent avoir amélioré leur technique de construction CAB:

  • les angles droits sont mieux faits
  • les murs sont droits, le respect des joints et la pose de briques ont été améliorés
  • les fondations sont plus profondes et plus larges et présentent un meilleur respect de l’axe de la pyramide
  • la notion du bon sol est désormais aussi prise en compte pour la CAB
  • la toiture est plus légère puisque moins chargée en banco

  • Impact du PCSB sur l’environnement

Afin d’apprécier l’impact du PCSB sur l’environnement au Niger en terme d’épargne de bois, 100 bâtiments ont été retenus au total dont 30 dans la région de Filingué et 33 dans celle de Zinder. Les superficies habitables (SH) de ces bâtiments sont estimées respectivement à 3150, 890 et 995 m2. Le choix de ces ouvrages a été guidé par l’information disponible, leurs formes simples et leur “faisabilité” en toiture terrasse en bois. Les réalisations plus complexes, comme les dispensaires, ont donc été écartées.

A défaut d’une formule permettant de quantifier le bois épargné et afin de pouvoir faire des comparaisons, nous avons fait l’exercice suivant sur le même bâtiment de 18 m2 de SH utilisé pour l’estimation de la quantité de bois consommé. La toiture de cet ouvrage a nécessité 5 lattes de rônier de 7 mètres, soit un pied de rônier, et 800 goulettes de Guiera senegalensis (environ 2m3). Ceci correspond à une consommation de 0,06 pied de rônier et 0,11m3 de goulettes par mètre carré de SH. Sur la base de ces données, l’économie de bois réalisée pendant les trois années d’existence du PCSB est la suivante :

  • dans la région de Filingué : 53 pieds de rônier et 98 stères de gaulettes soit 18 pieds de rônier et 33 stères de gaulettes par an
  • dans la région de Zinder : 60 pieds de rônier et 110 stères de gaulettes soit 20 pieds de rônier et 36 stères de gaulettes par an
  • sur l’ensemble du pays : 189 pieds de rônier et 347 stères de gaulettes soit 63 pieds de rônier et 116 stères de gaulettes par an

Ces valeurs sont relativement significatives au regard des multiples rôles écologiques et socio-économiques que jouent ces espèces en particulier et d’une manière générale toutes les autres essences utilisées dans la construction. Il s´agit pour ces espèces de fournir des aliments, de l’énergie, des médicaments, du fourrage pour le bétail, de protéger et d´améliorer les cultures agricoles, etc. Ceci est d’autant plus important que la coupe des arbres pour le bois de service est en partie responsable de la raréfaction et parfois de la disparition totale de certaines espèces comme nous l’avons dit précédemment. En sauvegardant ces espèces, le PCSB contribue aussi au maintien de la diversité biologique.

4. Viabilité

  • Ouverture du Programme

La construction sans bois ne peut évoluer dans le cadre stricte du PCSB, et son ouverture en cours au monde de la construction en atteste. La demande des institutions (OIT, CARE INTERNATIONAL, PEACE CORPS, NIGETIP,…) qui réalisent pour la plupart des bâtiments à caractère public (banques céréalières, dispensaires, ) semble également aller dans ce sens.

5. Stratégie ou démarche

  • La pertinence de la démarche actuelle du Programme

Le PCSB est chargé de la vulgarisation et de la sensibilisation à la technique CSB pour une diffusion rapide; sa démarche est surtout fondée sur la formation et le sponsoring de la technique.

Concernant la formation des techniciens, le programme n’a pas permis un transfert réel du savoir technique vers les techniciens. Le PCSB est toujours sollicité pour la conception dans le cadre de chantier important mais cette action est faite sous la forme d’une formation pratique en matière de conception. La formation des techniciens et architectes est toujours en cours.

Les maçons formateurs sont très compétents et très sollicités, soit par le Programme lui-même soit par le privé. Mais la tendance actuelle à les mobiliser sur un chantier fini pour le contrôle de bâtiment en saison de pluie semble non viable. Ceci, par ailleurs, pourrait diminuer la sollicitation de la technique de la CSB.

Conclusion

Perspectives de développement de la construction

Constructions avec bois
Elles continueront à être réalisées aussi bien en zones rurales et semi-urbaines qu´urbaines malgré la rareté d’un des principaux produits entrant dans leurs constructions dant le bois, et cela parce que leurs coûts sont nettement inférieurs à ceux des autres types de constructions qui n’utilisent pas le bois (CSB, semi-dur et dur). Le bois de service est fourni par les zones les plus boisées, et l’organisation d’une filière informelle très efficace parce que renforcée par l’inapplication et l’inadaptation des textes permet d’éviter les fluctuations de prix qui devraient accompagner l´augmentation du niveau de déboisement.

D’autre part, leur mise en oeuvre reste la plus simple car elles ne demandent pas beaucoup de technicité ni de temps. De fait, un maçon local aidé de deux ou trois manœuvres peut réaliser une CAB en une semaine ou dix jours de travail. Or, les tests montrent qu´une CAB offrent un aussi bon confort et une aussi bonne isolation thermique et phonique qu´une CSB. De même, les interviews et les mesures de température faites permettent de conclure qu’elles ont les mêmes effets d’isolation thermique que les CSB et qu’elles sont meilleures que les constructions en semi-dur et que les constructions en dur qui sont elles plus chaudes.

Enfin, si le toit est bien fait avec du bois résistant et de bonne qualité, les CAB ont une longévité comparable aux autres types de construction. Elles peuvent durer des générations.

Constructions sans bois
Les techniques et les matériaux de construction en dur sont importés et inadaptés au contexte rural nigérien aussi bien au plan socio-économique qu’au plan du confort thermique.

La CSB constitue une alternative entre les CAB qui utilisent beaucoup de bois dans un pays qui en est dépourvu, et qui en plus sont sujettes aux incendies, et les constructions dites modernes qui sont elles consommatrices de matériaux importés, donc chers, et le plus souvent inadaptés.

La stratégie du programme est fondée sur une utilisation de la terre crue et les “nouveaux” clients de la CSB demandent beaucoup plus de durabilité et d’esthétique, des résultats qui ne peuvent être obtenus qu’avec l’utilisation de la terre stabilisée.

Si la construction sans bois évolue hors-programme, l’embourgeoisement de l’ouvrage en tant que tel ne pose aucun problème et permettra sans nul doute une ouverture vers d’autres horizons encore plus éloignés de la masse rurale. Mais, dans le cadre de l’habitat, le transfert de modèle semble toujours avoir eu lieu de la ville vers la campagne. C’est toujours la campagne qui aspire à devenir comme la ville et pas l’inverse. Or si l’on accepte ce présupposé, il parait évident que l’adoption de la CSB par le milieu urbain ou semi-urbain ne signifie pas son retrait du milieu rural, mais que bien au contraire, elle marque le commencement d’une adoption durable et viable qui interviendra à long ou moyen terme.

Ceci est d’autant plus vrai que la CSB a une grande capacité d’adaptation et d’harmonisation à tous les milieux (urbain, semi urbain et rural), ce qui lui permettra de se développer partout où les conditions économiques et les exigences techniques de sa réalisation seront favorables. Ainsi, la construction sans bois pourra dans un premier temps se développer dans des zones arides et éloignées comme Iférouane où le bois de service coûte excessivement cher, où l’eau ne constitue un frein ni pour la fabrication des briques, ni pour les travaux de gâchage, et où le banco est de bonne qualité.

Autres constructions
Ce sont notamment les constructions en banco avec un enduit au ferro-ciment (semi-dur) et celles réalisées en matériaux définitifs (dur). Elles continueront à être faites pour une certaine catégorie de personnes tant que les matériaux existent. Quelques sociétés opèrent dans ce domaine comme la Société d’Urbanisme et de Construction Immobilière (SONUCI), la Nigérienne pour la Promotion Immobilière(NPI) ou encore la nouvellement installée société immobilière libyenne qui est en train de construire 52 petites villas de 200m² qu’elle mettra en vente à l’intention des populations.

Avantages
Leur avantage est qu’elles demandent moins d’entretien que les autres car elles sont enduites de ciment et que leurs toits sont le plus souvent en tôles, ce qui assure une bonne étanchéité. Leur longévité aussi est assurée, sauf pour les semi-dur dont les toits peuvent comporter du bois.

Inconvénients
Ils sont liés à la nature des matériaux mis en oeuvre (ciment, tôles, fers, planches etc.). En effet, l’utilisation des matériaux importés et coûteux les rend moins compétitives et de plus, les matériaux sont dans la majorité des cas inadaptés au climat du pays. Les habitations sont chaudes ou fraîches selon les saisons, et sont, en outre, inaccessibles à la majorité de la population à cause de leurs coûts élevés.

Le monde de la construction a sa dynamique et la CSB y a sa place. Le PCSB dans sa mission première se doit de la positionner dans le milieu rural pour favoriser une économie de bois de service et l’acquisition d’un habitat décent pour les plus pauvres. Toutefois, les enjeux sociaux et économiques qui ont joué en défaveur de ces objectifs et qui sont tangibles dans le temps et dans l’espace nous obligent à formuler des propositions qui permettent le maintien et la survivance de la technique à tous les niveaux de conception et d’exécution de la CSB, cela aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain.

Propositions et suggestions à l’UICN et à DW

Compte tenu de l’inadéquation des objectifs du programme et des activités entreprises par le lui, nous estimons que la mise en oeuvre actuelle ne s’oriente nullement vers l’atteinte des objectifs fixés au PCSB.

L’UICN et DW doivent:

  • Réorienter les actions de vulgarisation afin de toucher effectivement les populations les plus démunies
  • Préparer le retrait du PCSB par l’organisation et la formation du secteur du bâtiment

Réorienter les actions de vulgarisation

Il portera essentiellement sur le choix des personnes à sponsoriser qui pourraient être les maçons à former eux-mêmes ou bien des personnes du village (qui ont l’intention de construire pour y habiter) averties plusieurs mois avant la formation afin qu’elles puissent fabriquer le nombre de briques nécessaires. Le programme devra tenir compte de la contrainte de l´eau et de la disponibilité des clients à sponsoriser.

Les frais de déplacement octroyés aux maçons doivent être revus à la baisse afin de diminuer le coût de la main d’œuvre pour les constructions CSB futures. En ce sens, la formation pourrait concerner les seuls maçons de la localité qui abrite la session de formation.

Pour mieux s’insérer dans le milieu rural, la CSB doit faire partie intégrante d’un projet qui travaille déjà avec une population avertie, à travers diverses séances d’animation sur des questions environnementales et qui a une expérience de mobilisation de masse autour de travaux communautaires et individuels. La formation de maçons en CSB pourrait être un axe de travail du projet (de gestion du terroir par exemple).

Formation du secteur du bâtiment

Ceci suppose un transfert de la technique de la CSB vers le secteur de la construction qui est composé non seulement des maçons mais aussi des techniciens et ingénieurs du public et du privé, des architectes des écoles et des centres de formation en technique de construction. Cela implique pour le programme une réorientation de ses activités vers un public plus large et plus divers.

1. Compte tenu du coût financier et du coût social de la CSB, il est difficile de l’entreprendre aujourd’hui dans la majorité des villages. Mais si l’on effectue une certaine zonation, la CSB, allié au le système actuel de vulgarisation du PCSB, peut avoir des succès dans le nord du pays ou mieux, dans toutes les zones où le coût du bois est très élevé (et où les conditions techniques sont réunies), comme à Iférouane par exemple.

2. Le PCSB doit continuer ses activités dans ces zones en mettant l´accent sur la formation de maçons-formateurs. Formation qui doit être par ailleurs plus large, de sorte que les maçons- formateurs soient disponibles et connus des services et de la population dans tous les départements pour des éventuelles formations de maçons CSB dans le cadre de Projets d’Environnement.

3. Outre la formation des maçons, le programme devra se pencher sur celle des techniciens de haut niveau (ingénieurs, architectes, techniciens supérieurs), des tâcherons, des entrepreneurs et des dessinateurs-projeteurs locaux. Cette formation tous azimuts aura pour effet non seulement de mieux faire connaître les CSB, mais aussi et surtout de permettre une meilleure vulgarisation de la technique par une reproduction spontanée et correcte des modèles de construction proposés. Faisant chaque fois appel à une technicité et à un savoir-faire nouveaux et déroutants pour les non-initiés, les CSB peuvent valoriser l’entreprise et lui conférer une image de marque. Les cycles de formation ne devront pas être purement théoriques ou sous forme de séminaires et de forums même si ces derniers restent efficaces. Une participation à des stages sur des chantiers, bien encadrés par un personnel qualifié, est un moyen d’acquérir des connaissances et une compétence pratiques à un coût de revient moindre, donc plus abordable.

4. De même, l’introduction de la technique de la CSB dans les écoles nationales de formation (lycée technique, IPDR de Kollo pour les agents du Génie Rural, …) permettra une plus grande vulgarisation du savoir et aussi un meilleur développement de la technique.

5. L’octroi de bourse de formation à des architectes pourrait constituer une alternative pour l’acquisition de la méthode en matière de conception de la CSB. La méthode de conception à retenir doit joindre les aspects méthodologiques de la conception et son adaptation dans la zone sahélienne. L’exemple de l’Egypte et de l’Iran (souvent sans gargouilles pour l’évacuation des eaux) serait inadapté au Niger où la pluviométrie est plus élevée.